Présentation

A.Ben-Art (Alexandre Bénard) est un artiste né en 1985. Il touche autant aux beaux-arts qu’au théâtre en passant par l'écriture, la bande dessinée, le graphisme et la musique.
« Que définie la réalité dans laquelle on vit ? » décrit bien sa démarche artistique.

Dans ce blog, vous trouverez un résumé de ses œuvres, des différents projets en cour de réalisation et de ses expositions passées et présentes.

Nouvelles littéraires

Tourbillons de pensés

Je pense trop. Les idées s’entremêlent, me demandant quoi faire. Moi, qui a toujours cherché à moins en faire, me sentant surmené à rien.

Je suis seul. Seul, dans un premier grand appartement, calme, en pleine ville. Moi qui a toujours préférer la campagne que je viens de quitter.

S’adapter. Prendre le temps de se vider l’esprit en enlevant ce qui nous surpasse. Laisser les choses aller. Prendre de la distance et juste faire sans se demander quoi, ni pourquoi.

Je suis un artiste, alors je dois créer. Peu importe si quelqu’un a déjà écrit quelque chose de semblable. On commence par quelque chose et d’un coup les idées viennent tout seul. Juste suivre le cours des mots qui claquent sur le clavier. Suivre le cours du temps.

Demain est un autre jour et peut-être que ce texte ne mènera à rien. Qui sait? L’important, c’est de créer, de me libérer l’esprit sans tombé dans le cercle vicieux de l’anxiété qui se nourrit de lui-même.

Pour ceux qui ne me connaissent pas, Je m’appelle… D’ailleurs comment je m’appelle? Voilà que je ne sais même plus quel est mon nom! Je me tracasse tellement que je ne sais même plus mon nom. Celui que mes parents, décédés aujourd’hui, m’ont donné.

Prendre une marche. De l’air frais. Sortir voir du monde. Ou juste changer de lieu. Histoire de faire quelque chose, qui ne demande pas trop d’organisation, pour me changer les idées.

De la musique. Marcher avec mes écouteur jouant mes chansons préférer. Me créer un cycle  bénéfique en attendant que les choses se calment. Juste le fait de penser que tout sera terminé dans quelques temps, ça me rassure. Respirer. Prendre le temps de respirer par le nez et d’expirer par la bouche. J’en suis à réapprendre à respirer… Chose qui est habituellement innée.

La tête me tourne. L’oxygène me monte au cerveau. J’hyper ventile. Mon cœur s’accélère. La preuve que je suis en vie. Je ralentis ma respiration. Les choses se calment.


Je me sens soudainement vidé. À bout de ma réserve d’énergie. Je sommeil, besoin de repos. J’étais juste fatigué, épuisé psychologiquement.



Combat intérieur

Je suis schizophrène. Par définition, je vis trop dans ma tête; je me fais des scénarios; j’imagine des faits et des gens qui n’existent que dans ma tête. Quand je prends le temps de remonter à la cause, je découvre que ça vient du fait que je suis un artiste introverti. Ça semble contradictoire, mais les faits font en sorte que je ne m’en tire pas trop mal; la plupart des gens croient que je suis normal jusqu’au jour où ils me voient en pleine crise.

Lorsque ça arrive, les gens y voient d’abord une incohérence entre ce que je dis et ce que je fais. Je démontre un dégoût envers quelqu’un mais je lui dis que je l’apprécie; Je parle des facettes de ma personnalité comme s’ils étaient des insectes qui se trouvent dans ma tête en leurs donnant une personnalité distincte à chacune.

Mes proches amis me demandent souvent comment je peux parler de cela aussi aisément et avec autant de lucidité tout en étant aussi distant pour ce qui est de discuter des choses de la vie. Je me dis que je suis une contradiction qui se complète d’elle-même.

Car, je suis en équilibre précaire; un rien me fait chavirer et j’ai tendance à m’isoler pour éviter l’inévitable. J’entretiens mon problème en essayant de le combattre.

Il me vient à l’esprit qu’il me faudrait quelqu’un pour me pousser à dépasser cet isolement autoprescrit, mais voilà que les désastres que je causerais dans sa vie me poussent à éviter cet approche. Je me retrouve encore seul et isolé dans la prison que je me suis construit dans ma tête. C’est immanquable une partie de moi, n’est jamais d’accord avec moi.


Plus j’essaie de m’en sortir, plus les choses se corsent. Cette illusion du contrôle me tue de l’intérieur. Lâcher prise. Laisser les choses aller d’elles-mêmes. Juste me concentré sur ce que j’ai à faire. Écrire, composer, pratiquer mes compositions, m’amuser, vivre simplement.


L'égoïste bonté

On naît tous pour mourir; la seule chose qui fait la différence c'est ce que l'on fait entre. Cette phrase je me la répète trop souvent depuis trop longtemps. Au point ou la seule chose que je vois, autour de moi, c'est la mort, la souffrance que certain font aux autres, les injustices provoquées par l'incompréhension des situations que l'on vie et de vouloir en faire toujours plus trop vite.

On juge. Souvent sans vraiment comprendre car on cherche à passer au dossier suivant de peur de manquer de temps pour tout ce qu'il nous reste à vivre; pour tout ce que l'on voudrait vivre. On cherche à rattraper le temps perdu; à se racheter de nos fautes. On cherche à donner pour tout ce que l'on a pris. On s'attribue ce que l'on pense qu'on nous doit; ce que l'on croit mérité; ce que l'on croit avoir besoin.

On en vient à en vouloir plus car on s'imagine que chaque peine vaut une récompense; qu'à chaque souffrance infligé une indemnité est la moindre des compensations. On donne pour se faire pardonné ou se sentir alléger de notre culpabilité. On donne parce qu'on nous a donné; parce que l'on croit que c'est mérité. Pour se sentir apprécié ou pour montrer que l'on n'est pas égoïste. On demande parce que l'on veut avoir ou parce que l'on ne veut pas faire et quand on nous demande, on croit aussitôt que c'est pareil pour tout le monde.

La vie ce n'est qu'une suite d'événements qui s’enchaînent les uns aux autres pour, de temps en temps, donner un sens à ce qui nous échappe. Il n'y a de fatalités qu'en ces choses que l'on ne peut accepter. Quand on a compris, il nous reste à vivre, avec cette réalité, le temps qu'il faut, parfois pour le reste de notre vie, pour apprendre à suivre le cours de la vie. C'est alors, là seulement, que nous pouvons arriver à profiter pleinement de la bonté égoïste de la vie.


La loterie de la vie

La vie peut parfois être un cauchemar qui ne semble jamais se terminer, bien que l'on se croit heureux de ce que l'on a, comme ce fût le cas les vingt-six premières années de ma vie. J'ai souvent penser mettre fin à ce désastre que je provoquais et que je m’obstinais à mettre sur la faute des autres. Personne n'aime s'avouer que l'on est responsable de notre malheur, mais dans le fond, c'est la faute à personne. Les chose arrivent; c'est tout. C'est ce que l'on appelle le destin. C'est ce que l'on appelle la vie.

Mon existence avait pourtant bien commencer; j'ai survécu à ma naissance. J'ai été chanceux. Je suis né dans une famille qui arrivait à me nourrir. J'avais un père, une mère, une sœur et un frère. J'ai eu de la chance au départ. Ma malchance à commencer le jour où j'ai voulu changer les choses. Le fait d'être insatisfait de ma vie, déjà à l'âge de cinq ans, m'a suivi toute ma vie. Je n'ai cessé d'attirer les désastres depuis.

La séparation de mes parents : je m'y tenais responsable, comme n'importe quel enfant de huit ans. Les disputes avec mon frère, qui ne sont toujours pas terminées malgré toutes ces années, ne venaient pas uniquement de lui; il voulait seulement l'attention de son frère. Je n'ai toujours pensé qu'à mon bonheur et de ce fait, j'ai rendu mon existence misérable.

J'avais tout dans mes mains : un talent fou et une intelligence remarquable, mais j'ai préféré m'apitoyer sur mon sort, comme n'importe quel enfant perturbé par le déchirement d'une famille. J'aurais pu être bien plus apprécié à l'école, mais j'avais beaucoup trop de haine pour laisser entrer quelqu'un dans ma bulle. J'avais besoin d'aide à cause de la malchance que je n'ai jamais eu. J'avais besoin d'aide pour m'ouvrir les yeux.

Quand on me l'a enfin offert, j'ai laissé couler. L'inertie remplaça l'enfermement sur soi. Tous ont cru qu'ils m'avaient sauvé, du moins l'espéraient. J'ai pu survivre en ne faisant que le minimum. Jusqu'au jour où les choses se compliquèrent, j’atteignais le fond du barri. À force d'encaisser sans riposter, on accumule de la colère. Toujours plus de colère. J'avais trop de moral pour y succomber, alors mon corps m'en a brouiller les yeux. Je paniquais à la vue de ces tâches noirs qui cachait la réalité que je croyais perdre.

Évidement suite à cela, l'école a fait ce qu'il fallait pour me sauver; provoquer le rejet de ma mère à cause de mon insatisfaction de notre vie familiale. Moi qui croyait pouvoir sauver mon frère et ma sœur aussi, je n'ai réussi qu'à me faire rejeter par tout le monde. Me voilà donc seul, innocent et coupable à la fois, dans une famille accueillante mais qui n'est pas la mienne avec ces jeunes qui sont tous plus dépravés et abandonnés les uns que les autres.

Je croyais pouvoir me faire aimer davantage ici, mais comment aimer une personne lorsque l'on a aucune idée de qui il est, dans un monde où il faut se méfier de tout et que personne ne vous a jamais aimé ? Bref, en voulant me faire accepter, je n'ai réussi qu'à me faire influencer dans la déchéance : drogue, alcool, vandalisme et vol... Pour un adolescent qui voulait être parfait, dans une famille parfaite, c'était raté!

Pour m'en sortir, j'ai essayer de faire ce qu'on attendait de moi; faire comme tout le monde; être un mouton qui suit le troupeau vers l'abattoir. On m'a donné l'opportunité d'apprendre en travaillant dans des milieux qui me plaisaient, j'ai abandonné par orgueil, ne voulant pas admettre que j'avais tord, que les patrons ont le droit de nous obliger à faire ce qu'ils veulent car nous sommes leurs employés. Mais ce n'est qu'une aberration de plus que je ne comprenais qu'à moitié.

À travers tout ça, j'ai évidement voulu exploité mes talents, mais à chaque fois où je commençais à réussir, à me démarquer, je quittais les lieux; fuyant la gloire que je ne méritais pas, comme j'ai fuit les femmes que j'ai aimé. De toute apparence, ce n'était pas fait pour moi. Cette vie n'était pas faite pour moi. Je croyais avoir perdu à la loterie de la vie. Je fis, donc pour la première fois, ce que je rêvait de faire depuis l'âge où j'ai détruit ma vie. C'était ça ou la mort. Ou était-ce une manière de dire au revoir au monde qui me détruisait ? Partir en beauté, c'est le rêve de tout homme d'ambition.

Sur ce chemin nouveau, j'appris à redécouvrir la vie; j'apprenais enfin à vivre. On aurait dit une résurrection. Une résurrection qui me reconduisait à mon point de départ : l'enfer que j'ai créé. C'était à croire que mon destin était seller. Même dans mes moments les plus heureux, je devais me saboter; moi-même n'était désormais plus important à mes yeux d'égoïste. Maintenant, c'était la négligence qui prenait, insidieusement, le contrôle de ma vie. Ha, la traîtresse ! Une autre qui m'abandonne, mais cette fois, c'était en m'empoissonnant l'existence; m’asphyxiant lentement pour me faire souffrir jusqu'à la mort. C'était officiel : j'étais mon propre ennemi et le pire, même plus que je le croyais.

Puis, il y a eu un moment d'espoir, une femme, la première à vraiment m'aimer pour tout ce que je suis. Étrangement, je n'y était pas beaucoup plus heureux, mais qu'en à être suicidaire aussi bien l'être avec une personne qui peut vous faire oublier, l'espace d'un moment, la souffrance que j'endurerais au moment choisi. Ou était-ce parce que je croyais qu'il y avait encore de l'espoir ? Peu importe le pourquoi, cette fois-ci, c'était pour une bonne raison; je l'aimais et je voulais que nous en profitions avant qu'il soit trop tard.

Bien entendu, l'année de la lune de miel passée, les choses reprenaient leur cour normal; le mal renaissait des cendres encore chaudes, tel le Phénix des légendes. J'étais prêt à mourir, pour qu'elle ne souffre pas de moi, mais fait ironique, si je m'éteignais, elle ne le serait plus jamais de cette manière. J'étais dans une impasse, une terrible impasse. Je devais mettre fin à la partie, une bonne fois pour toute; en sortir vainqueur. Les dés étaient jetés.

J'entrevis une carte que je n'avais jamais pris en considération dans mon jeu, le joker. Jouer un tour à la chance, lui voler la partie avec la carte sortie de prison; me perfectionner dans un milieux prometteur : la technologie. En tout cas, ce fût mon idée de départ, mais comme d'habitudes les choses ne se sont pas passées comme prévus; j'avais encore des chaînes aux pieds, les fantômes de mon passé me retenaient sur place continuellement. Alors, je doublais d'effort jusqu'à en être mort d'épuisement et m'endormis. Dormis, comme jamais avant; me laisser aller pour voir ou cela me mènera. Voyant le temps passé, je réfléchis. Après tout, c'est la seule chose que j'avais pour m'occuper : penser, analyser, trouver l'erreur dans le contrat. Je revis tout ce que j'ai fait dans ma vie, résumer tout à un mot : combattre. Je crois que cela à été ma plus grosse maladresse; me battre contre moi même, contre la vie, contre le destin.

J'ai toujours su que je suis quelqu'un de bien et le fait d'avoir peur de moi-même me sembla tout d'un coup absurde. Je ne comprenais plus pourquoi j'en faisais une tempête dans un verre d'eau. Les choses ne semblaient plus les mêmes et je ne voyais plus trop comment je m'en étais sorti avec si peu de blessures. Puis, j'ai réalisé que ce combat était en fait ma guérison lente et douloureuse de mon incompréhension du monde. J'ai, donc, continuer à analyser tout, comme j'aimais si bien le faire, comme j'ai toujours aimé le faire et surtout en trouver les solutions. J'en ai toujours eu le potentiel, mais je ne m'en donnais pas la chance; je savais que j'avais le billet gagnant et j'avais peur de récolter le prix de peur de le perdre... on joue pour s'amuser; on vie pour s'amuser. La vie est la loterie à laquelle on perds uniquement si on a peur de perdre.


La liberté d’un torturé

Je suis un nouvel homme, je suis un ex-détenu, j’ai trouvé la liberté par erreur. Je cherchais le bonheur, j’ai vécu l’horreur. Je voulais l’amour, on m’a trahi. Je voulais me faire aider, ils m’ont démoli. J’ai voulu qu’on me punisse, ils m’ont bourré de pilules. J’ai demandé pardon, ils m’ont barricadé. Je suis devenu fou, on m’a attaché. J’ai perdu raison, autre chose prit le contrôle…

Cet esprit malin, me torturant l’esprit, fut pire que les autres; j’étais impuissant contre lui. Il me gardait prisonnier dans ma tête. J’étais là, dans une prison de neurones qui se faisaient charcuté par toutes ces drogues que me donnais les infirmières. Mon univers se réduisait à des électrochocs et des injections d’informations binaires. On/Off. Oui/Non. 1/0. Le seul langage possible à cet échelle. Je devenais un robot. J’étais maintenant un parasite, un corps étranger à cette drôle de machine, en chair, qu’est devenue mon corps. Par défense, il tenta de m’expulser, mais les mailles serré de nerfs étaient trop solide et dense pour me permettre de passer outre. Ils devaient opérer.

À travers les câbles et les vitres des circuits électroniques, je captais les gestes des chirurgiens. À travers les bouches d’aérations, j’entendis le bruit de la scie ouvrir la carrosserie et les bips des machines qui suivaient le rythme du moteur. Une faille se fît dans les connections de fils. Deux pinces me prirent. Tout le monde me regardait. Ils n’avaient jamais rien vu de leur vie comme ça. Ils me mirent dans une éprouvette, et me passèrent aux rayons-X. Je pris la forme de particule. Petit. Petit. Plus petit. Encore plus petit…

Je me ballade entre les atomes, naviguant dans le vent cosmique des particules subatomique, parcourant les onze dimensions, surfant sur les corde, passant au travers des anneaux et traversa la cloison. Je suis nulle part, dans le vide, le néant, entre deux univers, à l’abri de tout. Je suis libre, je ne suis plus.


Laurence

Un samedi du mois de mars, je me suis levé l'esprit bousculé. Rien ne pressait, mais ma vie venait de chambouler. J'ai perdu la femme de ma vie. Elle n'est pas morte, mais je l'aurais préféré à cette cuisante humiliation qu'elle m'a fait vivre la veille. Devant tous mes amis à ma fête, elle m'a quitté, en avouant qu'elle me trompait depuis un an parce que je suis le pire amant qu'elle n'a jamais connu. Les gens parlaient autour de moi, mais je n'y comprenais rien. Seul l'alcool me faisait du bien. La soirée passée, j'ai bu la bouteille de whisky que m'a donné mon frère. Bas prix assurément, mais au point où j'en étais, je m'en foutais éperdument. Oublier devint ma devise. J'en restais là pendant quelques semaines. Comme certains disent : métro, boulot, dodo. La différence avec moi, c'est que ça commençait par mal de tête et finissait par vodka. Ceux qui avaient rit de moi, me prendraient désormais pour le pire des idiots. Je restais dans mon trou. En espérant que la vie aussi m'oublie. Mais maintenant que l'hiver tire à sa fin, j'aurais très peu de raisons pour éviter de sortir. Les femmes, moins vêtues, rempliront les rues et les hommes les terrasses pour les voir défilées comme dans un défilé. Ceux qui doutaient encore de ma santé mentale se diraient que finalement j'ai réellement perdu la boule. Et ils auraient indéniablement raison!

Me voilà un certain soir, où le soleil me disait au revoir du bord de ma fenêtre, j'étais encore seul chez moi. Pas pris de douche depuis trois jours, pas rasé depuis une semaine et rien manger depuis la veille. Bref, le gars qui se fout autant de lui que des autres. C'est à ce moment que j'ai commencé me poser des questions sur les raisons qui me poussaient à poursuivre ma vie. À vivre tout simplement. Je me suis mis à compter le nombre de personnes qui tiennent sincèrement à moi. Au bout de deux, j'ai démissionné. À quoi bon s'interroger sur l'avis des autres quand, peu importe la réponse, on en vient aux mêmes conclusions? J'ai eu un fou rire. Un moment de folie. Puis, ce fut la folie même qui me prit le bras et me montra le chemin de la rue. Je sortis accoutré comme un con, les cheveux emmêlés et la carcasse sales. Les gens me regardaient furtivement, comme si ma présence ne les encombrait pas. Un déchet de plus ou de moins, ça n'a pas tellement d'importance… Soudain, je vis Laurence. Ma Laurence. Celle qui a foutu ma vie en l'air! Celle pour qui j'étais prêt à mourir pour la rendre heureuse! Et comment me remercie-t-elle? Je me précipitai sur elle. La pris par la gorge et la clouai au mur du bâtiment.

- Si t'es venu pour me faire des problèmes, dis-toi que t'en as fait plus qu'il n'en fallait! lui criais-je au visage.

- Wow! Calme-toi! Me dit-elle en me repoussant. Est-ce que c'est comme ça que t'accueilles les gens? J'espère que tu ne veux plus de moi? Parce que si oui, tu t'y prends très mal!

- Comment veux-tu que je veuille d'une femme qui me ridiculise devant le monde? Rétorquais -je.

- T'as pas besoin de moi pour ça. Me dit-elle calmement.

Réalisant tout d'un coup ce qui se passe autour de nous, je rougis de rage; elle me ridiculisait encore une fois. Que voulait-elle à la fin? Pourquoi s'acharnait-elle sur la médiocre personne que je suis? Qu'est-ce qui la motive à venir me voir si je suis un si piètre amant? Même si elle voulait me reprendre, je crois que je ne voulais plus d'elle. Pas à ce moment. Je ne sais pas comment expliquer la manière dont l'amour s'est transformer en haine. D'ailleurs, je n'étais pas très conscient des émotions qu'elle me faisait vivre. Comme si j'étais dans une autre dimension! Je voyais, mais ne réalisait pas la splendeur du gâchis que tout cela provoquait dans mon for intérieur.

- Tu n'as pas à réagir comme ça Paul. C'est fini c'est tout. Je me suis mal comportée, mais ça ne change rien à ce qu’il est; je ne t'aime plus et c'est tout.

- Pourquoi es-tu ici? Qu'est-ce que tu me veux?

- Rien de spécial. Simplement te redonner tes clefs. Me dit-elle en déposant le trousseau dans ma main.

- Merci. Bredouillais-je.

Pourquoi merci? Je ne le savais pas. Elle repartit en direction inverse en me glaçant d'un regard doux et compassant. Je criais quelque chose. Je ne me souviens pas quoi, mais ce ne devait pas être très poli. Qu'elle aille se faire voir! Salope! Je passai au dépanneur avec mes maigres cinq dollars qu'il me restait avant mon prochain chèque. Le travail ne me motivant plus, j'ai opté, quelques jours plus tôt, pour le suicide financier : Aide social et travail au noir. Je développe des photos pour un ami photographe à temps partiel. Les produits chimiques me rendent à moitié aveugle, mais je tiens le coup. Au moins, je n'ai plus à me foutre de la gueule de minables qui cherche la paire de soulier qui feront leur bonheur. Le travail de vendeur n'est autre que de l'hypocrisie. Achetez, achetez. C'est notre meilleur solde de l'année! bullshite!

Pain et confiture. Rien de moins misérable pour un minable. Un repas du roi des cons! Par chance, il me restait encore une bouteille de whisky dans une armoire. Elle ne s'est pas fait prier. Je ne sais pas pourquoi, mais ça me semblait totalement démentiel. Du Jack Daniel's. Rien de mieux pour se taper un haut-le-cœur. Mais à quoi bon se soucier de malaise physique quand ton intérieur n'est que ruine et misère? À la moitié de la bouteille, j'ai vomi et sombré dans un profond sommeil.

À partir de ce moment, les choses empirèrent encore. Si on m'avait dit que ça existait, je serais parti à rire. Encore un rire de fou. La chose commençait à me plaire. En quelques jours, j'ai passé de victime à soûlon, de soûlon à dépressif et maintenant je suis un simple aliéné mental. J'y prenais plaisir. C'est tellement plus simple de se condamné malade mental que d'assumé nos tords. À force d'y croire, on finit par le devenir. La musique métal dans le plafond, je faisais des incantations au démon pour qu'il prenne mon âme et me décharge de mes actes. J'aurais enfin une bonne raison de parler seul et crier à tous un chacun les paroles les plus ignobles. Solution facile, mais totalement vaine.

Le vendredi premier avril, je m'achetais un costume de poisson et décidai de m'exhiber ainsi sur le coin des rues Ste-Catherine et St-Laurent vers trois heures du matin. L'heure cruciale de la fermeture des bars. L'heure "H. " Les fêtards riaient de moi. Je m'en foutais. C'était un des buts de ma démarche. Un jeune punk se dirigeait vers moi. Il me posa une question. Je n'écoutais pas. Il me poussa. Je ne bougeai pas. Ses amis nous rejoignirent et je perdis connaissance. Ce soir-là, je n'avais rien bu.

Je me réveillais sur un lit d'hôpital. L'hôpital Royal-Victoria. Une infirmière était penchée au-dessus du lit. Scène parfaite pour un film américain. L'esprit encore embrumé, je crus reconnaître le visage. Alors, je compris que ce n'était pas une préposée aux bénéficiaires, mais bien Laurence. La Laurence! Je me débattis dans mes fils, mais des douleurs à la poitrine me firent lâcher prise. Ma jaquette bleue complétait mon personnage de malade. Le portrait était parfait; la ravissante bourreau, la victime et ses blessures. Les infirmières en blanc me faisaient penser à des anges gardiens. De magnifiques gardiennes de la paix. Mais alors, pourquoi ne me débarrassaient-elles pas de cette démone qui empestait la cruauté sous son visage de déesse? Peut-être ne voyaient-elles pas le personnage? Où étaient-elles aussi complices de ce complot? La panique me prit et je cria. Un ange de la mort s'approcha avec une seringue. Je crus que c'était la fin. Enfin! La paix. L'interminable fin d'une vie de fou. Le noir s'installa. Le vide.

Un lundi du mois d'avril, je me suis levé l'esprit bousculé. Rien ne pressait, mais ma vie venait encore de chambouler. La lumière de la vie venait de me sourire. C'est l'annonce d'une mort qui m'a donné goût de vivre. Celle de Laurence. Elle est morte en même temps que ma folie.


Isabelle 

Tu as gâché ma vie. Tu m’as rendu fou. Certain disent que je l’étais déjà, d’autres s’en foutrent éperdument. Quant à moi, je ne sais plus. Parfois, tout va si bien et d’autres fois c’est le contraire. Je t’ai tellement aimé. Je t’ai tellement haïs. Je t’aimais à la folie. Je t’aimais à en mourir. C’était une obsession. J’avais besoin de toi. Tu es devenu ma raison de vivre. Sans toi, je n’existais plus. Avec toi, je devenais fou. Fou de rage de ton rejet. Fou d’amour de ta beauté. Je rêvais de te détruire. Je rêvais de t’aimer. T’aimer cruellement sans aucun scrupule. Te faire ressentir la souffrance qui émanait de notre amour. Te faire goûter à ta propre médecine.

J’étais si tourmenté que ma vie me rongeait les os. Il ne m’a fallu que de très peu de temps pour me liquéfier. Je n’avais besoin que de ta présence pour fondre sous ton regard charmeur. Ce regard qui m’hypnotisait chaque fois où je posais les yeux sur toi. Tu étais ma belle sorcière. Envoûtante et dévastatrice. J’en perdais la raison.

Suite à un moment de folie, tu me quittais. Ne laissant qu’un mot comme explication. À ce moment j’ai cru mourir. Mourir de rage. Mourir de chagrin. Ton départ m’a ouvert les yeux. Sans toi je n’avais plus de vie. J’étais un tronc d’arbre vide. Une carcasse à moitié pourrie. J’étais une charogne. Un rebut.
Aujourd’hui, tu n’es plus là depuis longtemps. Je rêve encore de toi. Cauchemar interminable. Cruelle débauche de ta personne. Je m’offrais, corps et âme, à toi. Tu en profitais pour me crucifier. Tu étais ma déesse et mon bourreau. Tu avais le contrôle de mon corps. J’étais à toi. Et à toi seul. Sans toi je n’existerais pas. Chaque fois, je me réveillais le front tout en sueur. Je regardais à côté de moi dans mon lit ; tu n’es plus là. Quel soulagement ! 


L'ignorance d'une mort certaine 

Je vais mourir dans une semaine. C'est mon destin. Pourtant, je ne le sais pas encore. D'ailleurs personne ne le sait. Seul mon inconscient peut le prédire. Malheureusement pour moi, il préfère garder le secret. Je ne comprends pourquoi. Pourquoi ? Pourquoi taire un secret si capitale ? Si seulement je l'avais su auparavant, j'en aurais profité… Oui ! C'est peut-être pour ça qu'il ne veut pas ? Oui. Il sait ce que je ferais, et donc, il veut m'en empêcher. C'est un complot. Mon inconscient m'a trahi. Je me suis trahi. Comment cela est-ce possible ? Comment peut-on se trahir ? Si ce n'est que par erreur. Non. Ce n'est pas possible. Je ne me ferrais jamais ça. Ce n'est pas possible. Pendant ce temps où je sombre dans l'ignorance de ma mort, le temps avance. Tranquillement ma vie s'achève sans que son rythme ralentisse. Le temps suit son court.

Me voilà deux jour plus tard. Je ne sais toujours pas que je vais mourir. Mon inconscient est toujours trop silencieux. Mes idées, par contre, vont très vites. Ils se doutent de quelque chose sans toute fois savoir ce qu'il y a exactement. Et voilà que mon inconscient par en guerre contre ma conscience. Clandestinement, me voilà en guerre contre moi-même sans que je le sache. Bref, je ne sais toujours rien. Sinon que le temps suit son court. Sinon que je vis toujours.

Le lendemain, je ne sais toujours pas que je vais mourir. Le saurais-je un jour ? Le saurais-je à temps ? Cela seul mon inconscient le sais. Mais il ne veut toujours pas parler. Il préfère se taire et me laisser dans l'ignorance. Cette ignorance qui me fait souffrir sans que je le sache. Je souffre d'une ignorance de ne pas savoir que j'ignore ma mort prochaine. L'ignorance est ce qu'il y a de pire.

Il ne me reste que quelques heures à vivre. Ce sont les pires heures de ma vie. Mon inconscient ne m'a toujours rien dit. J'ai l'impression qu'il ne me le dira jamais. Je dois attendre le moment pour connaître ma mort. Attendre. Attendre. Toujours attendre pour savoir que je vais mourir.
Ma vie s'achève. je n'ai plus que quelques secondes à vivre. C'est clair. Je ne le saurais qu'au moment de ma mort. 10, 9, 8, 7, 6, 5, 4, 3, 2, 1, 0. Je suis mort. Je suis mort d'une ignorance de ne pas savoir que je meure. L'ignorance c'est ce qu'il y a de pire. L'ignorance, c'est la mort. 


Le malheur d'autrui 

Pour moi, le malheur des autre est une drogue. Je me régale de ces petits moment. Un homme se fait jeter dessus par un pit-bull, une femme quitte son marie parce qu'il l'a trompé, un enfant se fait frapper par une auto… Tout ces scénarios me terrorisent tellement ils me font du bien mais le plaisir surpasse tout. Ha ! Quelle joie de savoir que je ne suis pas seul à souffrir !

Toute ma vie fut remplis de méchanceté et de mépris face à moi. À l'école, on me ridiculisait et me poussait constamment à bout. À la maison, c'était pire ; on me faisait souffrir physiquement pour me faire comprendre que ce n'est pas bien de faire mal aux autres. Quelle ironie ! Avec le temps, je me suis crée une carapace. Comme une tortue qui avance lentement, cette enthousiasme pour le mal gonfla en moi jusqu'à prendre la place du peu de lucidité qu'il me restait. J'étais devenu un monstre. Un monstre qui voulait être aimer et compris. Et pour ce faire j'avait la conviction que les autres devaient souffrir autant que moi. Alors, je me suis mis à semer la pagaye dans mon entourage. Petit à petit, sans qu'ils ne rendent compte de rien, ils se mirent à se haïr comme jamais. Moi, dans mon coin, je savourais chaque moment en pensant que j'avais atteint le paroxysme du bonheur. Je suis pathétique vous direz, mais réfléchissez un instant. Qui a-t-il de plus satisfaisant que la réussite d'un rêve ? Ok, ce n'est pas le fantasme le plus positif, mais cela n'empêche pas que c'était un triomphe.
Après quelques temps, je me suis mis à en vouloir plus. Encore plus. Toujours plus. Au point où je fini par oublier le but principal : me faire aimer, écouter et comprendre. Dès que m'en ai aperçut, l'envoûtement devint banal. Je commençais même à détester la dispute continuelle que j'avais moi-même crée. Le piège retombait sur moi. J'étais de nouveau une victime. Ma victime. Le bourreau et le prisonnier. Malgré tout, je gardais espoir. Peut-être qu'un jour, ils comprendront. Peut-être qu'un jour, la paix règnera dans ma vie. Au moins dans ma tête la lutte est terminée. Car après tout, l'essentiel c'est nous-même.


Mariage funeste 

Je magasinais nerveusement une robe car Jaques et moi devions nous marier dans deux jours. Pourtant, les préparatifs ont été interrompus, il y a une semaine, en raisons d’une anicroche. Malgré cela, je ne laisserais personne annuler l’évènement et ce sous aucun prétexte. Ne dit-on pas : “ pour le meilleur et pour le pire ” ? J’étais prête à célébrer notre mariage peut importe la circonstance ; personne ne pouvait m’arrêter. On était fait l’un pour l’autre. Je me rappelle encore de notre première rencontre, de notre premier baiser, de notre première dispute et de nos premiers ébats charnels…

Au début, l’idée de se marier n’avait pas vraiment séduit Jaques. Mais lorsqu’il a apprit qu’il avait le cancer, il s’était dit qu’il n’avait plus rien à perdre et se décida enfin à m’épouser. Ma mère passait son temps à me dire que ça allait me rendre malade et de le laisser mourir en paix. Déjà qu’elle ne l’aimait pas, lorsqu’il m’a demandé ma main, elle fit une de ses crises ! Elle était comme ça ma mère : Toujours prête à trouver des raisons pour chialer. Comme si ce n’était pas assez, les parents de Jaques se mirent eux aussi à boycotter le mariage vu la situation. Plus le temps passait plus les gens de mon entourage essayaient de m’en dissuader ; comme si je n’avais pas le droit d’être heureuse !

À l’heure et au jour dit, j’entrai dans l’église. Mon fiancé se trouvait déjà devant l’hôtel. Comme il semblait serein ! Les gens ne cessaient de me regarder en chuchotant avec leurs voisins. À les voir agir de la sorte, on aurait pu dire qu’il n’était là que par obligation ; leurs regards exprimaient tristesse et réprobation. Même le curé ne semblait approuver cette alliance.

- Je suis sincèrement désolé, dit le curé, mais je ne peux célébrer ce mariage.
- Et pour quelle raison ? Demandai-je.
- Parce que nous célébrons présentement ses funérailles.


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